«Le battement d'ailes d'un papillon au Brésil peut provoquer une tornade au Texas.» C'est Edward Lorenz, occupé à mettre un peu d'ordre dans la théorie du chaos qui en 1972 a inventé cette métaphore. Pour dire que le hasard d'une perturbation chaotique peut déboucher sur de grands événements.
Le hasard vraiment? 2000 ans plus tôt, Jésus évoque la graine de moutarde pour dire qu'il suffit d'être le porte-voix de Dieu, de dire une parole, d'avoir une foi aussi petite qu'une graine de moutarde, pour commander à un arbre de s'arracher d'ici et d'aller se planter ailleurs. Ou pour soulager un malade, distraire un enfant ou un adulte de la prison de leurs jeux vidéo ou apporter un peu d'espérance aux gens qui nous entourent.
Pas de messe à Compesières ce dimanche, place aux Musicales dont on trouve le programme ici. Quant aux messes proches ou lointaines, leurs horaires sont là. Les autres activités de l'Eglise catholiques à Genève sont là. Enfin, cath.ch, l'agence d'information des catholiques en Suisse, publie tous les jours des articles sur la vie de l'Eglise locale, suisse et mondiale.
Je vous en offre un (à télécharger ici). Il évoque l'Unité pastorale du Plateau (Onex, Petit-Lancy). Cet UP s’est pleinement engagée sur le chemin synodal ouvert par le pape François, écrit Raphaël Zbinden, dans son article daté du 2 octobre. Portrait d’une communauté qui pallie le manque de prêtres avec une pastorale intégrative et innovante. Et nous, et nous, et nous...
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Je n'en dirai pas plus sur l'effet papillon. Je laisse la plume à Pierre Emonet, qui eut une vie bien remplie avant d'être un vénérable prêtre à Carouge, que beaucoup d'entre vous, lectrices et lecteurs, connaissez. Il envoie son commentaire du dimanche par courriel. Il suffit de lui demander (@ pierre.emonet(at)gmail.com) pour être sur sa liste de distribution. Le commentaire sur l'Evangile de ce dimanche s'intitule:
La force des petits (Lc17,5-10)
Jésus vient de proposer à ses apôtres un programme qui les dépasse. Est-il vraiment possible de toujours pardonner, de ne jamais être une occasion de chute pour son prochain ? Déconcertés, conscients de leur propre fragilité, les apôtres lui demandent d’augmenter leur foi. Jésus les prévient qu’il ne s’agit pas de quantité mais de qualité. Même un petit grain peut faire bouger le monde et obtenir l’impossible. Et d’illustrer son propos par une image qui ne manque pas d’audace, sur leur ordre un arbre irait se transplanter dans la mer. Le défi est de taille.
Que celui ou celle qui en douterait veuille bien parcourir l’histoire du christianisme. Le message du fils du charpentier de Nazareth, s’est taillé un chemin à travers les siècles au point d’envahir le monde en dépit des pires difficultés, sans succomber définitivement aux nombreuses épreuves et tentations qui ont tenté de le dérouter. Traversant des tempêtes en tous genres, la barque de l’Église n’a pas fait définitivement naufrage grâce à des hommes et des femmes fragiles, qui n’avaient pas l’étoffe des héros, mais suffisamment de foi pour affronter les pires tortures et la mort. Avec un petit grain de foi certains ont renversé des structures sociales injustes, aussi solidement établies que l’esclavage et l’apartheid. De simples babouchkas ont tenu en échec l’athéisme de l’empire soviétique en multipliant les baptêmes et la prière. Des hommes et des femmes à la santé chancelante et aux moyens dérisoires ont fondé et développé des œuvres sociales ou des mouvements politiques qui, contre vents et marées, ont durablement tiré l’humanité vers le haut. Une énergie, un élan plus grand qu’eux et venu d’ailleurs les habitaient, un grain de foi les rendaient créatifs, endurants contre toute attente, capables de transplanter des arbres dans la mer. Ces hommes, ces femmes, ne s’imaginaient pas être les artisans du salut du monde, mais de simples serviteurs quelconques. Sans prétentions. C’était leur grandeur.
Dans une Exhortation sur la sainteté dans le monde, le pape François a épinglé une vieille hérésie des premiers siècles du christianisme, qui refait régulièrement surface. Le pélagianisme soutient que le chrétien est l’artisan de son salut, un combattant qui, à la force de son poignet, accumule des mérites et gagne du crédit auprès de Dieu. En mettant l’accent sur l’observance des lois et une fidélité crispée, elle rêve d’une Église de héros auxquels le Seigneur reconnaissant ne peut que se mettre à leur service. Exit la gratuité du salut : la grâce de Dieu est prise en otage. Dans l’imaginaire populaire, les héros remplacent les simples serviteurs dont parle Jésus.
Pierre Emonet SJ