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Persécutions

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La Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, du 19 au 25 janvier, coïncide cette année avec un drôle d’anniversaire: les 150 ans du Baptême à la baïonnette de Compesières. Dans notre grande paroisse du Salève, la Semaine de l’Unité commence ce dimanche à 10h au temple arménien de Troinex. Elle prendra fin samedi 25 janvier avec la messe à 18h et le repas de la Saint François, toujours à Troinex.

Quel mot pour relier ces trois événements? Un mot plein de maux, de rage et de ressentiments: persécutions. Un état de fait, dont on ne se relève que lentement par le dialogue, le pardon, la réconciliation, l’oecuménisme.

Messe ce 19 janvier à l'église arménienne


Crois-tu cela! Pour l’année 2025, les prières et réflexions de la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens ont été préparées par les frères et sœurs de la communauté monastique de Bose, dans le nord de l’Italie.


Cette année, c’est au tour des chrétiens arméniens d'accueillir ce dimanche à 10h les autres confessions catholiques et protestantes dans leur temple de Troinex pour une célébration oecuménique. En soi, c’est un moment heureux que de célébrer ensemble.

Cependant nous n’oublions pas que les Arméniens font partie des peuples parmi les plus persécutés au monde. 

Plus de 380 millions de chrétiens (1 sur 7 dans le monde) sont exposés à des persécutions et des discriminations fortes en raison de leur foi, indique l’Index 2025 publié le 15 janvier par Portes Ouvertes et cité par Cath.Info. 4476 chrétiens ont été tués; le nombre de cas non recensés est probablement bien plus élevé. Et 209’771 chrétiens ont été déplacés de force en raison de la violence et des conflits, dont près de 136’000 rien qu’en Afrique sub-saharienne.

Le repas de la Saint François

Le 25 janvier prochain, dernier jour de la Semaine de l’unité, aura lieu le traditionnel repas de la Saint-François après la messe de 18h. Depuis l’an dernier, cette manifestation conviviale est ouverte aux femmes comme aux hommes. Aucun rapport avec la Jeunesse Le Salève, dont la Tribune de Genève a évoqué récemment le dernier défi. Ce groupe de garçons exclusivement organise la Vogue de Bardonnex, une fête populaire qui n’est pas sans relation avec la religion catholique.  La Vogue a lieu le 15 août, fête de l’Assomption. Marie fut la patronne de la paroisse de Bardonnex avant son rattachement à Compesières, après la Réforme et le départ des Bernois… (à qui l’on doit le plafond peint de la salle des chevaliers de Compesières)

C’est là qu’entre en scène le repas de la Saint-François. Il s’agit bien de François de Sales, notre saint local qui fut fait évêque de Genève (en exil à Annecy) le 8 décembre 1602, quatre jours avant l’Escalade. Le prêtre, connu pour ses prêches ardents et sa douceur, avait déjà reconquis la région au catholicisme, faisant de la Cité de Calvin un bastion assiégé. Jusqu’à l'arrivée de Napoléon qui fit de la cité la capitale éphémère du département du Léman.

Genève prospéra non sans difficultés en développant un réseau international, berceau bientôt de la Croix-Rouge et de nombreuses organisations internationales, second siège des Nations Unies. 

L’Escalade est restée tout en haut de l’affiche dans les annales genevoises. Le “Cé qu’è lainô” est devenu l’hymne officiel du canton, inscrivant dans notre Constitution laïque l’action salvatrice de Celui qui est en Haut. L’histoire ne manque pas d’ironie. 

Moins connue est l'œuvre de Saint François. Et moins encore la paix de Saint-Julien, signée en juillet 1603, sous les auspices du roi Henri IV. Cette paix entre Genève et son voisin savoyard fut plutôt un cessez- le-feu politique et confessionnel, fragile mais durable. 

Le Baptême à la baïonnette de Compesières

Le Baptême à la baïonnette est aussi l’histoire d’une persécution. Tout au long du XIXe siècle, l’Eglise catholique, très hiérarchique et patriarcale, pour certain obscurantiste, s’est figée pour conserver sa position dans la société, notamment dans le domaine scolaire. Le pape Pie IX, d'abord un libéral, se raidit dans une posture anti-moderniste, refusant de voir que le temps était venu de “rendre à César ce qui appartient à César”. L’instauration en 1870 de l'infaillibilité pontificale fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase. Elle provoqua le schisme des vieux catholiques, ainsi nommés parce qu’ils entendaient revenir au mode de gouvernance plus décentralisé des premières communautés chrétiennes.

A l’inverse, les républicains, héritiers des lumières, luttaient pour s’émanciper du pouvoir des religieux et de leurs partisans et parfois les détruire.  

A Genève, le régime en place se durcit à son tour. En 1873, il fit voter une loi obligeant l'Eglise à se constituer en une organisation nationale détachée du Vatican et du diocèse. La très grande majorité des catholiques refusa ce diktat et resta fidèle à Rome. 


Une soirée publique, le samedi 8 mars à Compesières, marquera ce 150e anniversaire. Conférence de Sarah Scholl, historienne du christianisme à l’Université de Genève. Exposition de la Mémoire de Bardonnex. Buffet sur inscription: 30 fr par personne, 15 fr jusqu’à 18 ans. Tél 022 784 31 03 ou compesieres@cath-ge.ch.


À Compesières, en janvier 1875, on faillit en venir aux mains entre les deux camps. Un habitant de Carouge propriétaire dans la paroisse voulut fait baptiser son enfant par une prêtre qui avait prêté serment à la République. Les autorités locales refusèrent le 20 janvier d’ouvrir l’église, dont le même texte législatif avait remis la propriété aux communes. Le Conseil d’Etat démis les maires de leur fonction et mobilisa les gendarmes pour faire respecter la loi. Le 25 janvier, un lundi, sous une pluie battante, l’église de Compesières fut encerclée par la troupe. Il fallut percer un mur dans la sacristie pour libérer une porte et permettre le baptême controversé. 

Les cailloux volèrent  mais il n’y eut heureusement pas de blessés. Chacun rentra chez soi. La plupart des églises du canton furent affectées au culte officiel et restèrent vides. Ce fut le cas à Compesières jusqu’à Noël 1893. A Carouge, les catholiques romains ne retrouvèrent l’usage de leur église qu’en 1926. Plusieurs chapelles dite de la persécution furent bâties, à Compesières, sur une parcelle mise à disposition de la famille Mermillod, où s’élève en ce moment la nouvelle école communale. 

L’histoire est ainsi faite de bagarres et de persécutions. Elle est faite aussi par des femmes et des hommes acteurs de paix, de dialogue et de justice. Ce fut le cas chez nous, où peu à peu les vieux antagonismes ont fait place à une coexistence pacifique et même à de profondes amitiés. L’histoire oublie parfois leur nom. 

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